J’ai récemment fêté mes neuf années de maternité active. Oui, neuf ans déjà. Neuf ans, cet âge charnière entre l’enfance et l’adolescence, au cœur de la période de latence chère à la psychanalyse, où l’on commence à se poser beaucoup de questions… Cet âge où, en tant que parent, on essaie d’encadrer du mieux que l’on peut les confrontations grandissantes de notre progéniture avec le monde qui l’entoure, un peu moins Barbie et beaucoup plus Monster High. Neuf ans, un âge idéal, donc, pour avoir une conversation sérieuse avec son enfant afin de lui expliquer le mieux possible, et avec les mots les plus subtils possibles, la vie… numérique.
Entendons-nous bien : Neufans n’a pas découvert la vie numérique le jour de son anniversaire. Il n’y a pas eu de révélation particulière quand elle a soufflé ses bougies. Pas de grand secret dévoilé, sur le mode : « maintenant ma chérie, tu es une fille 3.0″. Les jalons de la vie numérique se posent au quotidien, au hasard des connexions qui s’établissent entre l’IRL et l’URL. Les enfants d’aujourd’hui baignent dans le Net depuis leur plus tendre enfance. Les recommandations se font au fur et à mesure, de manière empirique. Mais cette conversation un peu particulière que j’ai eue avec Neufans – les Américains, qui ont le sens de la formule, l’appellent le « tech talk » – a finalement permis de mettre en forme, de structurer tout ce qu’elle savait déjà, mais qu’elle va dorénavant pouvoir mettre en pratique de manière plus autonome avec sa propre tablette. C’était le cadeau qu’elle voulait (comme c’est surprenant), et si nous n’avons jamais cédé sur les consoles de jeu individuelles, une tablette 7 pouces nous a semblé au final approprié à son âge, afin qu’elle puisse jouer et surfer, l’idée étant de lui apprendre à faire ses premiers pas en ligne de manière responsable. Je lui tins donc à peu près ce langage…
On peut découvrir plein de choses formidables sur Internet, à condition de ne pas faire n’importe quoi. Comme dans la vie somme toute. Et là, je cite ma fille parce que je suis assez fière d’elle : « ben oui maman, ça c’est le monde comme il est, y a du bien et du moins bien ». Ne m’en veuillez donc pas si à ce stade du billet je me fends d’un <3, coeur en smiley.
J’ai continué en lui expliquant que si elle voulait que je la laisse se débrouiller seule, il fallait qu’elle me montre que je pouvais lui faire confiance : c’est-à-dire respecter les horaires de temps écran, ne pas se servir de la tablette dans mon dos, et ne pas s’en servir si je ne suis pas là. Je lui ai également expliqué que c’était sa tablette à elle, mais que j’avais un droit de regard : non pas pour l’empêcher de faire des choses, mais pour être sûre que tout se passe bien pour elle. Pas d’espionnage, mais de la surveillance tranquille.
Il me restait donc à définir à quoi correspond la notion de “ne pas faire n’importe quoi sur Internet”. On a commencé par le B.A.-BA, qu’elle connaît déjà par coeur : ne pas accepter d’amis inconnus, ne pas donner ses coordonnées, ne pas cliquer sur n’importe quel lien, ne pas écrire n’importe quoi. Comme je suis psychorigide de l’orthographe, j’ai également soumis l’utilisation de la tablette à une orthographe irréprochable, notamment lorsqu’elle envoie des emails, ou qu’elle retrouve ses copines sur un site de jeu. Mon côté 0.0, j’assume.
Surtout, comme je ne souhaite pas qu’elle devienne une consommatrice passive qui se sert de son écran comme d’un stylo Bic, on a revu ensemble ce qu’était un navigateur, une messagerie (instantanée et non instantanée), une adresse URL, un moteur de recherche, une appli, un App store, un environnement Android (celui de sa tablette) vs un environnement Apple (celui de l’iPad), un site, un blog, un réseau social… et toutes ces choses qui sont la base d’un usage numérique.
En gros, j’ai paramétré ma fille afin qu’elle sache faire face aux situations courantes en ligne. Et au final, je trouve beaucoup plus sain et plus simple, pour elle comme pour moi, de la paramétrer correctement pour sa vie numérique, que de devoir paramétrer un logiciel de contrôle parental. J’ai bien conscience que je peux le faire parce que Neufans a déjà ma confiance à la base, qu’elle soit numérique ou non. Chaque enfant, chaque famille, a des paramètres différents…
